Depuis le XIXe siècle, des nomenclatures ou nosographies de plus en plus sophistiquées sont mises en place autour de l’enfant avec la naissance de la pédopsychiatrie puis de la psychiatrie infantile. En dédiant, dès 1914, sa thèse de médecine à l’étude des enfants anormaux et des délinquants juvéniles, Georges Heuyer fait figure de précurseur en proposant de nouvelles méthodes de détection à partir de fiches alliant l’observation médicale, pédagogique et psychologique. Pour la première fois, la population ciblée sort de la seule arriération pour s’attaquer aux troubles du comportement. Il devient alors « impossible de séparer théoriquement et pratiquement, les anormaux des délinquants ; ceux-ci se recrutant parmi ceux-là ». C’est le démarrage de la vaine quête des facteurs étiologiques de la délinquance juvénile. Dans les années 1920-1930, sont créées les premières cliniques spécialisées et les consultations d’hygiène mentale infantile, puis les centres d’observation, toujours sous l’impulsion de Georges Heuyer. Enfants pervers, caractériels, impulsifs, névrotiques conflictuels… Chaque psychiatre définit alors ses propres catégories, élabore de nouveaux diagrammes de dépistage, publie des ouvrages savants, démultipliant à l’infini les classifications dont l’usage sur le terrain a donné lieu à des systèmes de classement sommaire, quand elles n’ont pas tout simplement tourné court.