Plans de la colonie pénitentiaire (1895)
Source : plans des établissements pénitentiaires de France dressés par ordre du Ministère de l’Intérieur, Melun, Imprimerie administrative, 1895
Château de La Motte-Beuvron (ca 1920)
Saint-Maurice est la première colonie pénitentiaire publique à avoir été créée hors de toute installation pénitentiaire préexistante. Sa vocation première est dictée par Napoléon III lorsqu’il achète le domaine en 1852. Celui-ci veut y développer une ferme modèle au milieu d’une vaste plaine encore inculte, couverte de landes et de bruyères. Son projet d’établir un village agricole pour y faire vivre une trentaine de familles d’ouvriers agricoles tourne finalement court pour des raisons financières. Il faut attendre ensuite 1872 pour que le président de la république Adolphe Thiers décrète l’installation d’une colonie pénitentiaire agricole publique sur les terres de l’ancien domaine impérial. Le château ne sera jamais destiné à accueillir les mineurs. Il sera réservé au logement du directeur et aux services administratifs.
Texte : Sylvain Cid
Source : carte postale, photographie colorisée
Crédit : droits réservés
Travail aux champs (ca 1920)
La grande culture constitue l’activité emblématique des colonies agricoles pénitentiaires qui se sont organisées selon la doctrine de la régénération mutuelle entre jeunes colons et terres incultes. Au coeur de la Sologne, le défrichage du domaine de La Motte-Beuvron a permis de dégager une superficie de 128 hectares de champs cultivables au sud du château, sur un domaine de 426 hectares qui compte aussi 197 hectares de bois pour la sylviculture, 40 hectares de prairies naturelles, 18 hectares de pâturages et 18 hectares de jachères. En mars 1936, un inspecteur général de l’Enseignement technique juge avec sévérité à la fois la faiblesse des apprentissages proposés par la colonie et son « ’écras[ement] par le souci de gérer l’exploitation d’un domaine trop vaste ». Ses préconisations, au nombre desquelles la renonciation « à l’exploitation de la ferme et du domaine », vont inspirer les réformes de 1936-1937 puis de juin 1938. A la Libération, la grande culture se maintient pourtant encore quelque temps au sein de l’Ecole professionnelle qui s’équipe de tracteurs et de moteurs Bernard. On y cultive le blé, battu à la ferme avec l’aide d’une batteuse, la pomme de terre pour la consommation de l’établissement, mais aussi le colza et le fourrage nécessaire au bétail pendant l’hiver. A côté d’une formation industrielle renforcée, la formation agricole se concentre sur l’élevage, la sylviculture, la viticulture, la laiterie et l’horticulture. Elle est réservée "aux jeunes gens que leur atavisme terrien, leurs attaches paysannes pousseront dans cette voie, ou chez lesquels le goût du travail rural se sera développé" (V. Hourcq, 1950).
Texte : Sylvain Cid
Source : Carte postale
Crédit : droits réservés
Promenade (ca 1920)
La « promenade » est une activité exclusive du dimanche, jour de repos lors duquel les jeunes colons doivent aussi assister à la messe et aux vêpres. Cette sortie peut être simple ou militaire, comme ici, tambours et clairons en tête dans la Grande Rue de Lamotte-Beuvron. Elle est mal perçue par la population, surtout lorsqu’elle n’adopte pas le style militaire et apparaît trop comme une marche de « lycéens ordinaires ». Des récits circulent, peut-être réels, peut-être imaginaires ou bien enflés par la rumeur publique, sur des vols ou des agressions perpétrés par les colons à l’encontre des habitants à l’occasion de ces promenades. Les jeunes délinquants ne semblent pouvoir se racheter que lorsqu’ils courent lutter contre le feu avec la pompe à incendie de la colonie dans les localités avoisinantes. Rassurante pour la population, la discipline militaire l’est aussi pour la direction de la colonie qui y voit le moyen d’inculquer obéissance et sens de la hiérarchie contre les attitudes rebelles et les « habitudes de la solidarité malsaine ». Parfaitement intégrée à l’univers de la colonie, elle se prolonge souvent par l’engagement « volontaire » de colons qui, l’âge venu, peuvent ainsi bénéficier d’une libération anticipée.
Texte : Sylvain Cid
Source : carte postale
Crédit : droits réservés
Sciage de long (ca 1920)
Occupant l’essentiel de l’emploi du temps, le travail rural est au coeur du projet de la colonie pénitentiaire de Saint-Maurice. Pour le docteur Picard en 1874, "Saint-Maurice sera désormais la pépinière où l’agriculteur saura trouver tantôt un serviteur ou un aide de ferme, tantôt un laboureur, un semeur, un faucheur, un vacher, un bouvier ou un berger qui manquent en Sologne, tantôt un bûcheron, un charretier ou un ouvrier charron, un jardinier, tous pourvus d’utiles notions spéciales dont ils auront fait déjà l’application." Ce qui importe avant tout, c’est qu’"au lieu de mauvais citoyens inutiles ou dangereux pour la société, le pays [retrouve] en eux des hommes utiles et dignes un jour de verser leur sang pour lui." Il faut attendre la réforme de l’institution à partir de 1938 pour que l’accent soit mis sur une véritable formation professionnelle, comme base de la rééducation.
Texte : Sylvain Cid
Source : Carte postale
Crédit : droits réservés
Atelier de charronnage (ca 1920)
Indispensable aux travaux agricoles, l’atelier de charronnage est le premier à être mise en place. Les colons y fabriquent entièrement roues, brouettes, charrettes et tombereaux. Le travail rural est alors au coeur du projet de la colonie pénitentiaire et occupe l’essentiel de l’emploi du temps. Pour le docteur Picard en 1874, "Saint-Maurice sera désormais la pépinière où l’agriculteur saura trouver tantôt un serviteur ou un aide de ferme, tantôt un laboureur, un semeur, un faucheur, un vacher, un bouvier ou un berger qui manquent en Sologne, tantôt un bûcheron, un charretier ou un ouvrier charron, un jardinier, tous pourvus d’utiles notions spéciales dont ils auront fait déjà l’application." Ce qui importe avant tout, c’est qu’"au lieu de mauvais citoyens inutiles ou dangereux pour la société, le pays [retrouve] en eux des hommes utiles et dignes un jour de verser leur sang pour lui." Il faut attendre la réforme de l’institution à partir de 1938 pour que l’accent soit mis davantage sur une véritable formation professionnelle comme base de la rééducation.
Texte : Sylvain Cid
Source : carte postale
Crédit : droits réservés
Match de football (ca 1930)
A l’époque de la colonie pénitentiaire, les heures de récréation quotidiennes sont limitées à une demie heure après chaque repas, pour 10 h de travail, une heure d’exercices et manoeuvres et une heure de classe en été, huit heures de travail et quatre heures de classe en hiver. Le dimanche, les colons ont droit à quelques heures de récréation et de promenades simples ou militaires, en dehors de la messe et des vêpres. Les photographies d’Henri Manuel vers 1930 montrent les pupilles de la Maison d’Education surveillée de Saint-Maurice jouant dans la cour ou au stade à différents jeux de ballon. Après la réforme de Saint-Maurice, les jeux sportifs seront particulièrement valorisés et apparaîtront comme un moyen à la fois d’observer et « traiter » les mineurs. Le journal Espère de la république de Saint-Maurice, largement diffusé à l’échelon local, se fera l’écho des exploits sportifs des jeunes de l’Ecole professionnelle dans les championnats départementaux.
Texte : Sylvain Cid
Source : carte postale
Crédit : droits réservés
Une fouille au corps (ca 1930)
Entre gardiens et colons, la fouille au corps fait figure de rituel propre à entretenir la soumission et l’humiliation de ces derniers, portant la méfiance réciproque à son comble. Les gardiens, appelés successivement « surveillants » après 1888, puis « moniteurs » après 1927 (sans que ces nouvelles dénominations n’accompagnent quelque changement que ce soit), sont en majorité, puis exclusivement d’anciens militaires recrutés localement, munis d’une qualification professionnelle mais souvent sans instruction. Leur sévérité, leur brutalité, leur grossièreté sont monnaie courante et généralement connues de leur hiérarchie qui n’intervient que peu, par souci d’autorité ou bien par manque de moyens. Les agissements vexatoires des gardiens constituent l’un des deux motifs, avec la mauvaise qualité de la nourriture, des mutineries de colons qui éclatent par exemple en 1912.
Texte : Sylvain Cid
Source : Carte postale
Crédit : droits réservés
La rédaction d’un journal (ca 1950)
Le journal Espère voit le jour au mois de janvier 1945. Il sera bientôt l’organe officiel de la « république de Saint-Maurice » que le directeur réformateur de la Maison d’Education surveillée, René Courtois, s’apprête à instituera le 5 décembre. Ce self-governement, en vogue dans les républiques d’enfants d’après-guerre, doit instaurer un esprit nouveau en associant davantage les élèves d’abord au fonctionnement, puis peu à peu aux activités de l’établissement. Le journal sera poursuivi jusqu’en 1970, après même le départ de René Courtois et la fin concomitante de la « république » en 1957. Largement diffusé à l’extérieur, il tend à dépoussiérer l’image de Saint-Maurice à laquelle le souvenir de l’ancienne colonie pénitentiaire reste encore attaché. Il se fait en particulier l’écho des brillants résultats sportifs de Saint-Maurice dans les championnats départementaux, comme de la visite du garde des sceaux Edmond Michelet en 1960.
Texte : Sylvain Cid
Source : Carte postale
Crédit : droits réservés
Atelier de tournage (ca 1950)
En plaçant la formation professionnelle au coeur de la réforme de Saint-Maurice, Vincent Hourcq et René Courtois enregistrent dès 1939 des résultats au CAP encourageants. Il faudra ensuite attendre la Libération pour que celle-ci soit reprise et développée. En parfait accord avec la philosophie de la toute nouvelle Direction de l’Education surveillée, cet apprentissage devient la base de toute rééducation, justifiant la citation de Jean Jaurès que l’on peut lire sur le mur de la salle d’atelier : "Aie le respect de toi-même et de ton travail" . Instructeurs techniques, éducateurs et personnels administratifs remplacent peu à peu les anciens personnels pénitentiaires, tandis que sont ouverts une dizaine d’ateliers industriels : ajustage, tournage, mécanique rurale, serrurerie, menuiserie, charronnage, maçonnerie, ciment armé, peinture, plâtrerie, dessin industriel. Ceux-ci sont complétés par des ateliers agricoles (élevage, sylviculture, viticulture, laiterie, horticulture) qui reçoivent les jeunes de niveau plus faible. Les plus instables sont quant à eux placés à l’élevage ou à la bergerie, ceux qui réussissent mal dans les ateliers peuvent être placés chez l’artisan. Un certificat d’aptitude aux métiers préparés par l’institution peut être décerné à ceux qui ne peuvent pas prétendre au CAP. En 1945, ils sont 46 reçus sur 50 élèves présentés au CAP. En 1955, ils seront encore 52 sur 80 à le réussir.
Texte : Sylvain Cid
Crédit : ENPJJ