

Notice
En 1841, Charles Lucas, inspecteur général des prisons, dont on connaît dès la fin de la Restauration les travaux sur le système pénitentiaire, achète 140 ha de marais au Val d’Yèvre près de Bourges. Son intention est d’y créer une colonie agricole pour les jeunes détenus.
Il est un des fondateurs de la Société de patronage des enfants libérés de la Seine dont l’objet est de suivre les jeunes détenus après leur sortie de prison. Bien qu’étant un des promoteurs de la maison d’éducation correctionnelle de la Petite Roquette à Paris, il pense qu’il est important que « sur le plan moral, le travail agricole, la vie à la campagne soient les meilleures conditions pour la santé et l’âme de l’enfant ». Il sera l’auteur de la célèbre formule sauver l’enfant par la terre et la terre par le colon.
C’est dans ce contexte que se situe l’achat du Val d’Yèvre : retirer les enfants délinquants et vagabonds des villes et leur permettre de renouer avec les valeurs rédemptrices du monde rural et du travail aux champs. Charles Lucas soumet son projet au ministère de l’Intérieur qui ne le retient pas. En 1846, il décide de se lancer personnellement dans ce qu’il va appeler « une aventure ». Le coût de la construction sera de 450.000 francs. L’Etat alloue à partir de 1847 80 centimes par jour et par colon pour les moins de 16 ans et 60 centimes pour les plus de 16 ans. Les premiers colons arrivent de la prison de Fontevraud le 29 août 1847. Ils sont 100 en 1850, ils seront 400 en 1860.
Charles Lucas ne retient pas le principe des chefs de famille mis en place quelques années plus tôt à Mettray F.-A. Demetz. Ce sont des contremaîtres gardiens qui encadrent les colons. Ils s’occupent de la surveillance et de l’apprentissage. Certains colons parmi les plus âgés pouvaient être utilisés comme surveillants, voire même enseigner les plus jeunes.
Les colons auront comme principales tâches le défrichage des marais. Le Prince Président visite la colonie le 15 septembre 1852 : « Continuez, dit-il, à élever ainsi les colons et à les conserver dans l’agriculture, c’est la meilleure garantie de leur devenir. » Certains colons travaillent à la forge, à la menuiserie ou s’occupent des bestiaux et des travaux agricoles. Tous préparent la première communion.
En 1865, Charles Lucas devenu aveugle, il est remplacé au Val d’Yevre par son fils docteur en droit. En 1872, la colonie est louée à l’Etat,qui finalement l’aquiert en 1878. En 1890, il y a 330 colons, on comptera cette année-là 39 évadés.
Suite à la loi de 1912 sur les tribunaux pour enfants, de moins en moins d’enfants sont envoyés dans les colonies publiques dont 6 fermeront entre 1920 et 1926. Le Val d’Yèvre ferme définitivement en 1924.
Texte : Jacques Bourquin
Documents
Liens externes
A propos de l’enseignement scolaire , site des Archives Départementales du Cher
Lettre de Charles Lucas fondateur de la colonie du Val d’Yèvre au Directeur de la colonie à propos de l’enseignement scolaire effectué au sein de la colonie
A propos des punitions, site des Archives départementales du Cher
Lettre de Charles Lucas fondateur de la colonie du Val d’Yèvre au Directeur de la colonie à propos des punitions en vigueur au sein de la colonie
Emploi journalier du temps, années 1850-70, site des Archives départementales du Cher
L’oeuvre de Charles Lucas
Retour sur Charles Lucas à l’occasion de l’acquisition de six volumes de ses oeuvres par la Bibliothèque municipale de Saint-Brieuc (2009).
La nationalisation (Ch.Lucas, 1875), site de l’ENAP
Texte daté de 1875 de Charles Lucas sur la transformation de la colonie agricole au départ privée en colonie publique.
Présentation (Ch. Lucas, 1861), site de l’ENAP
Texte daté de 1861 sur la colonie pénitentiaire du Val d’Yèvres fondée par Charles Lucas.